L'Auvergne thermale à l'époque gallo-romaine / Etienne Chabrol.

  • Chabrol, Etienne, 1883-
Date:
1931
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Credit: L'Auvergne thermale à l'époque gallo-romaine / Etienne Chabrol. Source: Wellcome Collection.

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    les cours d’eau mugissaient de cascade en cascade. Nos ancêtres ne s’en approchaient jamais sans effroi ; ils se sentaient environnés d’une multitude de génies invisibles ou présents et tout naturellement ils cherchaient à leurs côtés des divinités tutélaires. La Source s’of¬ frait à eux, la source calme et limpide qui les désaltérait et qui les délassait, et c’est ainsi que, par un contraste fait de crainte et de reconnaissance, le cœur des premiers hommes s’ouvrit, au sentiment religieux. Ce sentiment religieux se confondit bien vite avec le sen¬ timent thermal. Pouvait-il en être autrement dans cette Auvergne étrange, où les eaux jaillissaient émanant des vapeurs, dégageant une odeur et une saveur spéciales, laissant même sur le sol une em¬ preinte rougeâtre ? La vénération de nos ancêtres pour les sources ? (1) Elle ressort des très nombreux silex polis ou taillés que l’on a découverts à Néris, à Vichy, à Bourbon-FArchambault, dans les thermes les plus réputés. Elle se traduit par l’abondance des monnaies gauloises dont Le Mont- Dore et Néris ont fourni de très beaux spécimens. Elle apparaît éga¬ lement dans les fouilles si curieuses que Michel Bertrand (2) dirigea au Mont-Dore en 1823. On reconnut cette année-là que les bases des anciens thermes romains reposaient sur une nappe de terre et de rochers provenant d’un éboulement de la montagne ; les ouvriers creusèrent plus profondément et quelle ne fut pas leur surprise en découvrant une piscine quadrangulaire, faite de madriers de sapins soigneusement équarris et parfaitement conservés, assez vaste pour qu’une quinzaine de personnes aient pu s’y baigner à leur aise. Cette cuve recouverte par un glissement du sol révélait, de toute évidence, l’étape gauloise, antérieure peut-être de plusieurs siècles à l’arrivée des Romains. Enfin, dernier argument tendant à démontrer que nos stations thermales étaient connues bien avant la conquête de César, c’est l’énumération même de ces dieux gaulois : Evahus, Borvo, protec¬ teurs d’Evaux, de Bourbon-1’Archambault, de Bourbon-Laney, peut- être même de La Bourboule, qui eurent leurs noms gravés sur la pierre bien avant les dieux d’importation latine. Après la conquête de la Gaule, les Romains acceptèrent d’autant mieux' les traditions des vaincus qu’ils avaient eux-mêmes un culte spécial pour les eaux et pour les fontaines : « On vénéré l’origine des grands fleuves, écrit Sénèque (3) ; on dresse des autels devant les sources d’eau chaude ». Et Pline (4) précise eette remarque dans une phrase qui a traversé les siècles : « Les sources augmentent le nombre des divinités et font surgir des villes ». L’assimilation fut d’autant (1) Voir Bonnard. — La Gaule Thermale. Librairie Plon 1908. (Introduction et page 150>. (2) Michel Bertrand. — Note sur les antiquités découvertes au Mont d'Or, 1844. (3) Sénèque. — Epist. XLI. Edition Teubner 1853, t. III, p. 85. (4) Pline. — Histoire naturelle, livre XXXI, chapitre II.